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Amicalement Vôtre
Episode1
Prenez deux jet-setters séduisants en diable aux origines et tempéraments opposés. Installez-les dans deux bolides rutilants, plongez l’ensemble dans des intrigues trépidantes, pimentées de burlesque. Ajoutez une pincée de jolies femmes, épicez le tout d’un générique flamboyant : secouez fortement pour obtenir un savoureux cocktail débordant d’action, d’aventure, de charme et d’humour, bref, une série dont on ne se lasse pas tant l’alchimie Curtis-Moore n’en finit pas de nous délecter. Voici Amicalement Vôtre !
Duo anglo-américain
Aux origines d’Amicalement vôtre, il y a un autre véritable carton télévisuel : la série Le Saint. Simon Templar, aventurier au charme irrésistible, mélange de justicier, de détective amateur et de Robin des Bois moderne, traque les criminels à travers le monde et n’hésite pas à les dépouiller. Le personnage, à qui Roger Moore prête ses traits préfigure le plus aristocratique des héros de cinéma : James Bond (Que Moore jouera de 1973 à 1985. Mais c’est une autre histoire). Le succès du Saint, incite donc Robert Baker, son heureux producteur, à tester la formule d’un nouveau concept à travers l’un des épisodes de la sixième et dernière saison : « Le roi ». Ce volet et quelque part le pilote des Persuaders (titre original d’Amicalement votre). Pour voler à la rescousse de la fille d’un célèbre mathématicien enlevé par de mystérieux ravisseurs, Simon Templar y fait équipe avec un milliardaire texan La rivalité des deux chevaliers servants se mue rapidement en une jolie complicité, ce malgré des cultures et personnalités radicalement différentes.
1969. Dès la fin du tournage, Baker rencontre Lew Grade, le patron d’ATV, filiale de la maison de production et de distribution britannique ITC (Incorporated Television Company), afin de lui suggérer sa lumineuse idée. Lew Grade étant un fonceur visionnaire – il a produit notamment l’extraordinaire série Le prisonnier- Baker sent qu’il frappe à la bonne porte et le persuade de financer le projet, comme il l’avait fait pour Le saint. La formule du duo a déjà fait ses preuves : pour exemples la série Des agents très spéciaux avec Robert Vaughn et David McCallum ou encore Les mystères de l’Ouest avec les inénarrables Robert Conrad et Ross Martin.
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The Persuaders!
Lew Grade dit banco. Point de contrat écrit, l’accord se conclut à la confiance sur une poignée de mains et Baker s’attelle fissa au développement de la série dont il confie l’écriture à Dennis Spooner qui a tout de même commis, L’homme à la valise, Les Champions et le très atypique et léché Département S. L’émérite Brian Clemens, qui n’est autre que le scénariste-producteur de Chapeau melon et bottes de cuir, se voit remettre le projet, y opère quelques modifications et met en place les fondements du petit chef-d’oeuvre à venir. Pour parfaire l’union des deux loustics, il troque le personnage du Texan balourd contre un self-made man new-yorkais, issu du ruisseau et autodidacte, qui s’oppose à un aristo so British et bien sous tous rapports, fleuron des meilleures écoles du pays. Il introduit pour finaliser la recette, le finaud juge Fulton (qui sera joué par Laurence Naismith), l’homme à l’origine de la rencontre entre nos deux spécimens si dissemblables. Fulton voue sa retraite à la traque des bandits et autres criminels restés impunis ; voila pourquoi il fait appel à ces deux aventuriers oisifs qui, si on les force un peu, seront prêts à reprendre du service pour la noble cause. Les éléments sont là pour faire de The Persuaders un succès. Une série légère, pleine de suspense, rapide et reflet de l’élégance et de la fascination pour la vieille Europe.
Pourquoi The Persuaders ? A la base nommé The friendly persuaders, vite oublié pour cause de similitude avec un téléfilm existant, le titre induit l’idée que Danny Wilde et Brett Sinclair parviennent à faire abandonner la partie aux méchants par leur débrouillardise et leurs astuces. Sachant qu’en argot américain un « persuader » est une arme, on y voit aussi le fait que Danny et Brett jouent de leurs poings ou que quand ils tiennent en respect leurs adversaires, ils ne font pas feu.
Générique mythique
Le très successfull (et fraichement divorcé de Jane Birkin) John Barry, déjà compositeur entres autres des BO de James Bond, apporte la cerise sur le gâteau : la musique du générique devenue une anthologie, indissociable de la série et reconnaissable dès les premières notes. Véritable bijou, le générique présente en parallèle, selon la technique alors en vogue du split-screen (image fragmentée) les « dossiers » des héros-bleu comme le sang noble de Brett et rouge symbole d’impulsivité de Danny Wilde- déroulant les décors d’enfance de Wilde et Sinclair et retracent les faits d’armes des deux larrons, de la puberté jusqu’à l’époque qui nous occupe.
Casino et casting royal
Lew Grade contacte alors les grands réseaux de diffusion américains et parvient à vendre à l’avance la formule magique sur le seul nom du Saint des saints. Mister Moore n’est au départ pas trop partant pour remettre le couvert sur un format série ; après six saisons du Saint, Roger vise désormais le grand écran, briguant le rôle du Commander Bond, alias 007, grade qui vient juste d’être récompensé par la Couronne pour services rendus à l’industrie cinématographique anglaise. Jouant sur la fibre patriotique du sujet de sa gracieuse Majesté (cette dernière a besoin de faire rentrer des devises), la production convint Roger, un gros chèque également à l’appui, d’ accepter de sauver la Reine en tant que Lord Brett Sinclair, Sean Connery s’en chargeant quant à lui une fois de plus en tant que James Bond dans Les diamants sont éternels. Reste à convaincre le futur partenaire de Lord Brett Sinclair. Trois noms sont évoqués : Glenn Ford, jugé moyennement sympa, Rock Hudson, trop proche de Moore et…Tony Curtis. Le fait pour une production anglaise d’engager un Américain est un gros bonus lors les négociations visant à vendre la série à l’étranger ! L’idée est d’exploiter les différences entre le vieux et le nouveau Monde comme source de quiproquos comiques et de conflits amicaux. Le trio Moore-Baker-Nation (responsable des scénarios) s’envole illico pour rencontrer le beau Tony, lequel, circonspect sur la qualité de ses derniers films, sent là une superbe opportunité de relancer sa carrière. Le courant passe et Tony, apôtre de la cause anti-tabac, convainc même au passage Roger Moore de renoncer à la cigarette, lequel ne s’octroiera plus désormais que des cigares occasionnels ! L’affaire entendue, nos justiciers hédonistes n’ont plus qu’à parcourir la vieille Europe au service de sa Gracieuse Majesté et pour sauver la jolie veuve et l’orphelin.
Au printemps 1970, Tony débarque donc à Londres pour un tournage qui va durer dix-huit mois, à raison de deux semaines par épisode. Non-fumeur revendiqué, il trouve quand même le moyen de se faire arrêter à la douane pour possession de marijuana ! Roger Moore est déjà dans le sud de la France : opéré d’un calcul rénal, il se la coule douce en convalescence à Saint Jean Cap Ferrat chez un ami qui héberge aussi David Niven et Joan Collins. Curtis rejoint Roger Moore pour tourner six épisodes sur la côte d’azur entre Nice et Monte-Carlo. La série promettant d’être la grosse attraction télévisuelle de la saison 1971-72, la production ne lésine pas. Le budget d’Amicalement vôtre est conséquent : 100.000 livres par épisode. Roger Moore touche un million de livres pour sa participation, et Tony Curtis un pactole de plusieurs millions. On tourne en format 35 mm pour que la série ait tous les airs d’une production cinématographique. Cent cinquante décors différents ont été construits pour les vingt-quatre épisodes.
Aston ou Ferrari ?
Baker et Roger Moore -qui est aussi coproducteur- ont alloué aux personnages des véhicules à la hauteur de leur statut social, contactant les plus grands constructeurs d’automobiles. Aston Martin, fournisseur officiel des James Bond, prête son nouveau modèle, la DBS V8, confiant sur la pub que la série va apporter au lancement du bolide. Le modèle n’étant pas encore disponible au moment du tournage, Aston transforme une DBS 6 cylindres, la rebadgeant au passage d’un V8 sur ses flancs. Non contente de prêter une voiture, Aston dépêche un mécanicien sur le tournage pour superviser sa conduite et son entretien. Perfectionnistes jusqu’au bout, les producteurs customisent une plaque, intégrant les initiales de Brett Sinclair : BS1. Un habile clin d’oeil au coupé Volvo P1800 de Simon Templar, immatriculé ST1. A la fin du tournage, la DBS repartira à l’usine avant d’être rachetée par un particulier. Après coup, Roger Moore regretta de ne pas l’avoir acquise. Pour le turbulent Danny, rien de mieux qu’une rutilante Ferrari Dino 246 GT (production sera limitée à 3761 exemplaires), immatriculée à Modéne, la patrie de Ferrari. Le choix de ces bolides est l’un des atouts qui concourent au succès de la série : elles sont visibles dès le pré-générique du premier épisode, lors d’une course épique entre les deux protagonistes, de Nice à Monte-Carlo.
Auto : Citroën
2CV type A :
La Deuche Originelle
1948. En ces temps de reconstruction, c’est avec une voiture destinée au milieu rural que Citroën va reconquérir le marché français et européen. Retour sur la genèse et les premiers tours de roues d’une légende de l’automobile : la 2CV !
Retour en 1935. Edouard Michelin, qui vient d’acquérir quelques mois plus tôt (en 1934) Citroën, nomme Pierre-Jules Boulanger vice-président de la marque au chevrons et chef du bureau d’études de la célèbre firme automobile. Bourreau de travail, rigoureux, Pierre-Jules Boulanger est aussi l’homme de confiance d’Edouard Michelin (les deux hommes se sont rencontrés lors de leur service militaire), ce dernier l’ayant chargé de redresser Citroën et d’aider son fils, Pierre Michelin, dans son rôle de jeune président de la firme. Avec Citroën, Michelin compte bien mettre en chantier et développer différents projets et concepts automobiles. Plusieurs d’entre eux sont d’ailleurs axés sur la motorisation des campagnes. C’est dans ce but que Pierre-Jules Boulanger convoque un jour de 1935 son chef du personnel et lui dit : « Faites étudier par vos services une voiture pouvant transporter deux cultivateurs en sabots, cinquante kilos de pommes de terre ou un tonnelet à une vitesse maximale de 60 km/h pour une consommation de trois litres aux cent…ce véhicule doit pouvoir passer dans les plus mauvais chemins et doit être suffisamment léger pour être manié par une conductrice débutante. Son confort doit être irréprochable, au point de pouvoir transporter un panier d’oeufs tout en roulant dans un champ, et ce sans en casser un. Son prix devra être inférieur à celui de notre traction avant. Enfin, je vous précise que son esthétique m’importe peu !» Déjà le côté populaire, rural, utilitaire, économique et confortable fait partie du livret de famille de ce qui deviendra la future 2 CV.
Nom de code : TPV
Les premières études de cette « automobile rurale » portent d’abord, comme pour la Traction, sur une voiture à structure monocoque, aux lignes rondes et fluides, rappelant aussi sous certains aspects, des courbes de la célèbre berline. Toutefois, son style affirme déjà ce que sera celui de la 2CV. Le sytème de suspension, à ressort à lames, est central et incorporé dans le longeron de caisse (le ressort joue à la fois sur le train avant et arrière). Le premier choix de motorisation, porte sur le flat twin culbuté d’une moto Gnome et Rhône. Plusieurs maquettes seront alors réalisées, dont au moins une, grandeur nature et même, selon plusieurs sources, deux prototypes. Plusieurs éléments ne plaisent guère à Pierre-Jules Boulanger qui demande le remplacement de la caisse monocoque par un modèle à plate-forme, faisant office de châssis. Il demande également l’étude d’ une motorisation maison.
1937 marque un nouveau tournant dans l’histoire de Michelin et de Citroën. Cette année voit le décès de Pierre Michelin dans un accident de la route. Boulanger devient alors le grand patron de la marque au double chevrons. Il lance la production de quarante neuf prototypes qui ont pour nom de code TPV, initiales de « Très Petite Voiture ». Ces véhicules sont élaborés en vue d’une présentation du modèle au salon de l’auto de Paris, en 1939. Les premières TPV sont réalisées en Duralumin, un alliage d’aluminium, manganèse et magnésium, qui résiste particulièrement à la corrosion et qui permet d’alléger au maximum le poids du véhicule. La face des ailes et le tablier avant de forme ondulée, ce système d’emboutis permettant de renforcer ces pièces. Toujours dans un soucis d’allègement mais aussi de commodité, la TPV est désormais munie d’une capote en toile en guise de toit. L’intérieur a été simplifié au maximum. Le volant est en tube cintré. Le levier de vitesses, droit, intègre la planche de bord. A côté de lui se trouve une platine rassemblant seulement un cadran d’ampèremètre (permettant de surveiller la charge de la batterie) et une tirette de starter. Les banquettes avant et arrière sont en toile renforcée (toile de bâche), sur l’assise desquels est posé un large coussin amovible, rembourré de crin. Leurs dossiers sont, quant à eux, suspendus par un système d’élingues à chaque extrémité.
Vers la voiture populaire
Les portières en demie lune, sont facilement démontables pour faciliter le chargement du véhicule. A l’avant, la TPV ne dispose que d’un seul phare, qui selon les prototypes, sera d’abord fixé devant le radiateur ou à l’avant du tablier (à la base du pare-brise) avant de trouver sa véritable place à l’avant gauche du capot ou sur l’aile, (comme l’autorise le code de la route en vigueur à l’époque, sur les véhicules référencés « Quadricycle à moteur », la futur 2CV entrant dans cette catégorie en raison de sa motorisation) sur les prototypes suivants. Côté motorisation, le choix porte désormais sur un bicylindres à plat de 375 cm3, refroidi par eau, couplé à une boite de vitesses à trois rapports avant et une marche arrière. Si la cible première de la TPV est le monde agricole, cette dernière va rapidement s’élargir à celui des artisans et des petits commerçants, tant en milieu rural qu’en ville, mais également aux cadres, aux fonctionnaires et à certains ouvriers. En effet, les nouvelles lois et avancées sociales depuis la fin de la crise de 1936, associées à une baisse et à des aménagements du temps de travail, aux congés payés et à des hausses de salaires, sont autant de facteurs importants dans le développement d’une automobile plus populaire. La TPV entre parfaitement dans ce cadre. Dans une note datée de janvier 1938, destiné au bureau d’étude, Pierre-Jules Boulanger insiste d’ailleurs sur le fait que la TPV doit « …pouvoir être achetée par un ouvrier, donc ne pas couter cher ». « Le Patron » insiste aussi dans cette même note, sur le fait que la petite voiture doit être la plus économique possible, au point de pouvoir rouler 50 000 km sans q’une pièce mécanique ne soit remplacée. Elle doit, aussi, pouvoir être entretenue aisément par son propriétaire.